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  • Photo du rédacteurmutambak96

Les dessous pas très chics de la libération de Kamerhe



18 heures, le Falcon immatriculé 9H-GRS s’arrache du sol ! Dans l’appareil, le plus célèbre prisonnier de la RDCongo regarde par le hublot le soleil se coucher et scintiller les premières lumières de Kinshasa. Ceinture bien accrochée, l’homme est soulagé. Il repasse en boucle les dernières heures de négociation qui ont précédé son départ. C’est le film de ces deux dernières années démarrée à Genève, poursuivi à Naïrobi et brutalement interrompu à Kinshasa que, Vital Kamerhe et Hamida Chatour, les deux passagers du Falcon, emportent avec eux.



A ses côtés, son épouse, la sémillante Hamida Chapour, est elle aussi perdue dans ses pensées. La belle métisse quadragénaire pour laquelle l’ancien directeur de cabinet de Félix Tshisekedi a promis la mort au président du tribunal lors du fameux procès du programme des 100 jours s’est démenée corps et âme pour conserver le patrimoine du couple. Des enquêteurs commis à l’étranger ont dressé une évaluation des Villas, hôtel, appartements, comptes bancaires et valeurs mobilières du couple Kamerhe qui avoisine 70 millions de USD.


Félix Tshisekedi et Denise Nyakeru ont été très complaisants envers les Kamerhe. Contre le silence de Vital qui a gardé secret les affaires d’argent qui le lient au couple présidentiel, rien n’a été saisi, confisqué ou arraché. Hamida a conservé les clés du coffre-fort. Et son mari est aujourd’hui un homme libre.


Les conditions de la libération de Vital Kamerhe


En échange de la libération provisoire – qui n’a de provisoire que la coquetterie qu’y apportent quelques hommes de droit naïfs - assortie d’une caution de 500.000 dollars US, Félix Tshisekedi a obtenu de Vital Kamerhe son soutien pour sa réélection à la tête de la RDCongo. Une tournée des deux hommes dans le Sud Kivu devrait sceller ce nouvel accord. Il faut dire que les pressions exercées sur le Chef de l’Etat congolais ont été nombreuses. Parmi la plus insistante celle du Président du Kenya Uhuru Kenyatta qui a vécu l’arrestation de Vital Kamerhe comme un affront personnel. C’est à Naïrobi en novembre 2018 que le Chef de l’Etat Kenyan et son principal opposant Raïla Odinga avaient adoubé l’accord Kamerhe-Tshisekedi.


Seule condition posée par l’ancien Directeur de Cabinet de Félix, un voyage de reconstitution en Europe afin de goûter l’air de la liberté retrouvé, faire du shopping dans quelques enseignes de luxe et goûter à la literie des grands hôtels parisiens dont il a été privé au cours des 18 derniers mois. C’est à ce titre et en gage de la réconciliation que Félix Tshisekedi a pris en charge pour 120.000 Usd l’affrètement de l’avion privé du couple Kamerhe. Si dans l’entourage du Chef de l’Etat le silence est de rigueur, dans l’opinion, cette libération marque les esprits.


"Comment laisse-t-on partir un voleur?", tonne un jeune qui revendique appartenir à la Lucha. "Cette libération est une prime au détournement, après çà qui peut encore parler de Congo Hold-up ?", affirme un journaliste. Si la presse nationale au service du pouvoir a évoqué un avion médicalisé et une évacuation sanitaire aux Etats-Unis, c’était pour distraire l’opinion congolaise. C’est dans un jet tout à fait aux normes de voyage d’affaires que Kamerhe et son épouse ont pris place pour atterrir nuitamment à l’aéroport du Bourget à Paris. A l’atterrissage, aucune ambulance ni aucun urgentiste ! Juste une limousine avec chauffeur prévue pour acheminer Vital et Hamida dans un hôtel 5 étoiles de la capitale française.

Ainsi se termine un des épisodes les moins glorieux de la lutte contre la corruption, le détournement des deniers publics et le grand banditisme à col blanc engagée par Félix Tshisekedi.

Une histoire de Première et Deuxième Dame du Congo



En réalité, la libération provisoire de Vital Kamerhe a été arrachée de haute lutte par Denise Nyakeru et Hamida Chatour. La première étant originaire du Sud Kivu a vite compris l’avantage pour son époux de sortir Kamerhe de prison. Et entre Denise et Hamida, la complicité ne date pas d’hier !


Dans le passé, dans le sérail, personne n’a oublié que les deux épouses dont l’une, Hamida, revendiquait aux temps du début du régime Tshisekedi d’être la deuxième Dame du pays, ont géré la République. Dès l’annonce des résultats des élections de décembre 2018, Denise et Hamida avaient immédiatement échafaudé les plans visant l’une et l’autre à se mettre à l’abri des soucis matériels. Chacune d’elle avait emprunté des chemins chaotiques, noué des liaisons sulfureuses et enduré tous les sacrifices pour atteindre les sommets de la société congolaise. L’élection de Félix Tshisekedi était donc une occasion inespérée. Il n’y avait pour elles aucune seconde à perdre dans la course à l’enrichissement rapide. Le premier gros dossier pour lesquelles les deux épouses allaient s’entendre consistait à puiser dans la manne pétrolière générée par le fonds de réserve stratégique destiné à prévenir toute crise ou urgence nationale. L’auteur intellectuel de ce détournement rôdé de longue date n’était autre que l’actuel président du Sénat, Modeste Bahati, qui, lors de son passage au ministère de l’Economie, n’avait cessé de puiser généreusement dans ce montant revolving de 15 millions Usd mensuels constitué en carburant.


Changement de régime et donc de bénéficiaires ! Désormais l’épouse du tout puissant directeur de cabinet de Félix Tshisekedi et la Première Dame vont tisser des liens si étroits que l’argent liquide est partagé entre les deux foyers. Pas toujours à proportion équitable ! Ce qui est ressenti comme une injustice de la part du couple Kamerhe va conduire le Directeur de cabinet à la faute dans le dossier sulfureux du programme des 100 jours. Sur les 400 millions USD mis à disposition pour réaliser les projets du Chef de l’Etat, Vital Kamerhe va endosser le choix de plusieurs prestataires douteux présentés par son épouse. Du côté du clan Tshisekedi, même chose ! Les frères – particulièrement l’un d’entre eux, Christian – est au four et au moulin. Au bout du compte, devant les juges, seuls trinqueront les hommes d’affaires naïfs ou indélicats qui auront surfacturés les ouvrages pour déposer des mallettes d’argent liquide à la présidence de la République.


Sur le plan politique, Vital Kamerhe joue à fond la carte de la Première Dame Denise Nyakeru. Tout comme le directeur de cabinet de son mari, Denise Nyakeru est originaire du Sud Kivu. La Première Dame est en difficulté face à la fratrie et au diktat de sa belle-mère Marthe qui gère les intérêts de son fils et de la famille kasaïenne. Fort de sa position et du chéquier de la République, Vital n’hésite pas à ordonner les dépenses en faveur de l’épouse de Félix. Leur complicité est parfaite. Elle va créer des jalousies dans le premier cercle du pouvoir. Le nœud se resserre sur le cou de Vital Kamerhe qui est de plus en plus la cible des attaques violentes de la communauté kasaienne qui vit sa présence et celle de Denise Nyakeru comme une intrusion dans leur pouvoir. Le Directeur de Cabinet va être sacrifié sur l’autel des intérêts régionalo-tribalistes. En quelques semaines, la chute de Kamerhe va s’accélérer. Dans un mise en scène inédite, le procès à grand spectacle, retransmis en direct sur la chaîne de télévision nationale, va emporter Vital Kamerhe. Félix Tshisekedi dispose d’un trophée à brandir au peuple congolais et à la communauté internationale qui attend toujours la tête de Joseph Kabila.


Le grand chambardement annoncé


La dernière scène de la libération de Vital Kamerhe se joue début décembre 2021. De plus en plus préoccupé par sa réélection en 2023, le président Tshisekedi redoute de perdre l’Est du pays.

L’état de siège décrété dans l’Ituri et le Nord Kivu et les alliances nouées avec les voisins pour mettre fin à la guerre sont loin d’être suffisants pour convaincre les populations de Goma et de Bukavu. Et dans ces deux provinces, le poids politique du président du Sénat Modeste Bahati et celui du jeune ministre de l’ESU Nzangi Muhindo et du ministre de l’Industrie Julien Paluku sont très loin de compenser ceux de Vital Kamerhe et de Mbusa Nyamwisi. Le Nord et le Sud Kivu vont immanquablement échapper au Président Tshisekedi.


Au Maniema, la tentative de mise à l’écart de l’ancien Premier Ministre Augustin Matata par la voie judiciaire s’est révélée être un fiasco total. La fronde des sénateurs opposés à la levée de l’immunité de l’ancien Chef du Gouvernement et les réseaux internationaux de celui qui fut longtemps considéré comme le bon élève des institutions de Bretton Woods ont définitivement raison de la fougue des partisans de la condamnation et de l’arrestation de Matata.

Quant au Katanga, l’homme sur qui s’appuie Félix Tshisekedi pour contrer Moïse Katumbi se révèle être un poids plume dans l’opinion. Dany Banza et son Premier ministre Sama Lukonde ne font pas l’affaire. Pas plus que les gouverneurs Kyabula et Fifi Masuka. Tshisekedi se voit donc contraint de revoir sa copie. D’autant qu’au sein même de son cabinet, la guerre des clans est déclenchée. Les incendies éclatent de toute part. Entre François Beya son conseiller spécial et Fortunat Biselele son conseiller privé la guerre est déclarée. Tout comme entre Guislain Nyembo son directeur de Cabinet et son ministre des Finances Nicolas Kazadi. Ou encore entre son conseiller spécial chargé des investissements JC Kabongo et son directeur de cabinet Adjoint Wameso. Quand ce ne sont pas les coups de poings assenés par son conseiller spécial Tshimanga aux supporters d’un club de football ou les élucubrations médiatiques de Marcelin Bilomba.


Le retour aux affaires de Kamerhe et des hommes de Kabila


Devant le danger de plus en plus imminent de la perte de crédibilité de son régime et les débordements de ses troupes trop occupées à s’enrichir qu’à entretenir la dynamique politique, Félix Tshisekedi a donc décidé de jouer à fond la carte Kamerhe. Parallèlement, dans l’entourage du Chef de l’Etat on annonce un véritable tsunami. Le Président veut renverser la table. A la tête des institutions, le président du Sénat devrait être débarqué et remplacé par un homme de confiance. A Samy Badibanga, le Chef de l’Etat porte ses faveurs sur Evariste Boshab. Ce choix permet de présenter l’image de la réconciliation avec les tenants de l’ancien régime. Face à l’absence d’autorité décriée à l’encontre du Premier Ministre Sama Lukonde et de son mentor Dany Banza, le président Tshisekedi compte faire appel au Président de la FEC, Albert Yuma. Au-delà d’être un beau-frère, Félix Tshisekedi reconnaît dans l’ancien patron de la Gécamines une autre qualité non négligeable, celle de disposer d’un très solide carnet d’adresse en Belgique auprès du groupe Texaf et en Chine.


Au niveau de l’UDPS, on s’inquiète de ce nouvel épisode du pouvoir. "Au rythme auquel on annonce les changements, l’UDPS n’existera plus pour le second mandat", se plaint un proche d’Augustin Kabuya. Comme tout pouvoir, la raison commence à l’emporter sur l’affectif. Dans l’entourage du Chef de l’Etat, l’écartement des plusieurs conseillers est à l’ordre du jour. Félix Tshisekedi est déterminé à conserver le pouvoir. Longtemps reportée, la visite du Roi des Belges Philippe est prévue au second semestre. Tout comme celle du Pape François. Le Chef de l’Etat congolais est plus que jamais déterminé à mettre les petits plats dans les grands pour redorer son blason tant au niveau national qu’international. Pour accueillir ses hôtes de marque, il n’a pas hésité à s’offrir un palais flambant neuf au coût de 100 millions USD et à s’octroyer les services d’Albert Buisine, l’ancien très discret intendant du maréchal Mobutu.


Félix Tshisekedi a donc décidé d’abattre ses cartes en vue de sa réélection. Les acteurs sont connus. Le retour en grâce de Vital Kamerhe aux côtés d’Evariste Boshab, Adolphe Lumanu et Albert Yuma marque d’une nouvelle empreinte kabiliste la fin du premier mandat. Le peuple congolais sera-t-il séduit par ce grand chambardement ? Rien n’est moins sûr. 27 millions de Congolais souffrent de la faim et le périple kasaïen a exposé la détresse de tout un peuple qui attendait Tshisekedi comme le Messie. Le temps dira si Tshisekedi aura joué à temps les bonnes cartes.

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