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  • Photo du rédacteurmutambak96

A un an des élections, Tshisekedi, Bemba et Kamerhe jouent au poker menteur


Comme tout le monde le sait, le poker menteur est un jeu de dés fondé sur le bluff qui se joue à partir de deux joueurs, mais qui trouve sont piment à partir de 5 joueurs. A ce jour, au sein du pouvoir, les trois principaux joueurs autour de la table sont Félix Tshikedi, Jean-Pierre Bemba et Vital Kamerhe. À l’évidence, avec la CENI, la Cour Constitutionnelle, la Territoriale, l’armée et tous les postes régaliens du gouvernement en poche, le Chef de l’Etat congolais semble disposer d’une quinte gagnante. Mais tout n’est qu’apparence. Pour emporter la mise, le président congolais sait qu’il a besoin de ses deux alliés. C’est là que le bât blesse ! Aucun d’eux n’est disposé à enregistrer de nouvelles promesses sans lendemain.



Le cas de Jean-Pierre Bemba est sans nul doute le plus révélateur de la stratégie du bluff et de la manipulation dont use Félix Tshisekedi à l’endroit de ses alliés. Après avoir fait campagne avec Moïse Katumbi pour Martin Fayulu, l’ancien chef rebelle à tout abandonné pour rallier avec armes et bagages la majorité de l’Union Sacrée. Bien entendu, cette transhumance ne s’est pas faite gratuitement. Le fils de feu Jeannot Bemba a présenté à Félix Tshisekedi la facture. Et la note est salée ! Pour sceller cette alliance, pas moins de 40 millions USD de faux procès et de vrais arrangements ont été convenus entre JP Bemba et Félix Tshisekedi. Trois décisions de justice sont donc tombées dans l’escarcelle de l’ancien chef rebelle qui s’est vu accorder 21 millions USD dans un procès contre la RVA, 12 millions USD dans une affaire contre l’ex-BCDC devenue Equity Bank, et 7 millions USD pour le dédommagement de sa villa de Maluku. Bien entendu, toutes ces affaires étaient largement surfacturées quand elles ne constituaient pas tout simplement des créances frauduleuses.


Toutefois, au cours des dernières semaines, les décisions de justice favorables à JP Bemba dans les deux premiers dossiers ont été soit portées en appel, en ce qui concerne la RVA, soit tout simplement annulées, pour ce qui est d’EQUITY BANK. Dans une partie de poker menteur, il faut savoir bluffer. Et Jean-Pierre Bemba semble avoir découvert tardivement le règles du jeu !


Ce revirement de la justice a une explication. Elle s’appelle Félix Tshisekedi ! Le premier magistrat du pays hésite en effet à confier à son « allié » de l’Equateur les ressources financières qui pourraient lui permettre de s’affranchir de sa tutelle et ainsi retrouver son indépendance. Aujourd’hui, après 10 ans de prison, l’ancien chef de guerre squatte toujours la maison paternelle. Il ne dispose pas des moyens de sa politique d’autant que la grande fratrie des Bemba guette tout mouvement financier suspect que serait tenté d’opérer leur aîné sur la succession de Jeannot Bemba. L’ancien Vice-Président vit difficilement sa situation.


Une entente de... façade


« Bemba est un homme dangereux. Il vaut mieux le garder en laisse avant qu’il ne vous morde», dit, sous couvert de l’anonymat, un proche du Président Tshisekedi qui explique en termes non voilés la stratégie du Chef de l’Etat Congolais. «Dans l’Equateur, nous avons le ministre d’Etat Guy Loando, qui fait du bon travail. Lui, au moins, il fait des actions sur le terrain qui sont visibles et profitent à l’image du Président de la République », poursuit le conseiller. Originaire de Boende, le ministre d’Etat en charge de l’Aménagement du Territoire est aujourd’hui devenu la carte du pouvoir pour empocher les voix de l’Equateur. Avocat des entreprises chinoises d’Etat qui ont signé, à l’époque de Joseph Kabila, le contrat du siècle congolais de 6 milliards USD de financement des infrastructures contre des ressources minières, Guy Loando dispose non seulement d’un matelas financier personnel plus important que celui de JP Bemba mais surtout de la proximité de Simon Cong, le patron de CREC 7, la plus grande firme de construction chinoise opérant en RDCongo.


Très chères Palissade


Simon Congo dispose de la gestion des péages routiers du Kongo Central et de Kasumbalesa. Par l’entremise de Guy Loando, les recettes de ces péages ont permis l’achat des véhicules Palissade généreusement offertes par Félix Tshisekedi au 608 députés et sénateurs pour obtenir les voix nécessaires au renversement de la majorité dont disposait l’ancien Président Kabila au Parlement. Coût de l’opération, 35 millions USD.


Pour maintenir le fil de la relation, Félix Tshisekedi a quand même tenu à apaiser Jean-Pierre Bemba en le rassurant que ses dossiers en justice trouveraient rapidement une solution... positive. Pour achever de convaincre l’ancien rebelle qui continue à le conseiller sur la manière de gérer le M23 et les rébellions de l’Est, le Chef de l’Etat a donné ordre que quelques postes lui soient laissés dans le récent partage des entreprises publiques.

A l’Est du pays, le président congolais a une partie bien plus délicate à jouer avec Vital Kamerhe. Fraîchement sorti de prison, l’ancien directeur de cabinet, condamné en avril 2020 à 20 ans de prison pour le détournement de plus de 50 millions USD a finalement, sur instruction de Félix Tshisekedi, qui décidément prend très à coeur son titre de premier magistrat du pays, été blanchi par la justice. Oubliés le fiasco des 1500 maisons préfabriquées payées rubis sur ongles à l’homme d’affaires libanais Jamal mais jamais livrées, les contrats douteux signés en toute opacité et les millions de dollars débloqués dans la précipitation pour la construction de routes et de sauts de moutons. Les 37 millions USD sortis en liquide de la banque se sont eux aussi mystérieusement évaporés. Quant au procès-fleuve au cours duquel l’accusation avait dévoilé que le couple Vital Kamerhe-Amida Shatour possédait un compte conjoint approvisionné de 10 millions d’euros et de trois propriétés en France dont un hôtel, son souvenir fait désormais partie des archives classées. Cold case ou presque !


La peine de 20 ans de prison qui avait été réduite en appel à 13 ans en décembre 2021, s’est donc vue annulée par la Cour de Cassation. « Le procès de Vital Kamerhe a été politique et son acquittement aussi », affirme un membre de la société civile. Jean-Claude Mputu, porte-parole de la campagne « Le Congo n’est pas à vendre » déclarait que « On a l’impression que dès le départ on a voulu mentir et tromper le peuple. Si ce n’est pas Vital Kamerhe, qui a pris cet argent ? ». Question demeurée sans réponse...


Au prix des promesses de lutte contre la corruption et les détournements des deniers publics, Félix Tshisekedi tente donc de renouer avec Vital Kamerhe pour constituer une parade face à un front swahilophone anti-Tshisekedi. A ce sujet, « Le Prix Nobel de la Paix Mukwege, l’ancien Premier Ministre Matata et Moïse Katumbi ne sont pas des petits clients », affirme notre interlocuteur de la Présidence. L’entourage de Félix Tshisekedi prend la menace de la constitution d’un bloc de l’Est très au sérieux d’autant que Mbusa Nyamwisi vient de déclarer lui aussi sa candidature et que le président du Sénat, Modeste Bahati, pourrait comme beaucoup s’y attendent faire faux bond à la dernière minute. Quant au silence de Joseph Kabila, il ne laisse rien présager de bon pour le camp présidentiel. Dans quelques semaines, le congrès du PPRD devrait lever le voile sur la stratégie de l’ancien président qui selon la rumeur qui bruisse à Kinshasa ne veut plus entendre parler de Félix Tshisekedi.


Félix qui ?

Alors que son bilan, tant sur le plan sécuritaire que celui du développement, flirte avec le désastre, Félix Tshisekedi sait qu’il a besoin de Vital Kamerhe. Raison pour laquelle il a financé sa tournée « Amani » à raison de plus de 500.000 Usd. « Au bout du compte, ce safari s’est transformé en campagne d’autopromotion au cours de laquelle Vital Kamerhe n’a pas dit un seul mot pour la réélection de Félix Tshisekedi pour son second mandat », constate, lucide, un témoin oculaire de la tournée. Au grand désappointement du Chef de l’Etat, lors de son périple, l’ancien président de l’Assemblée Nationale a pris soin de ne jamais mentionner le nom du Chef de l’Etat ni d’afficher un quelconque soutien à sa politique.


« Vital Kamerhe est un véritable animal politique. Il sait qu’il constitue aujourd’hui le seul poids lourd susceptible de soutenir Félix Tshisekedi pour la présidentielle de 2023. Il vendra très cher sa position », affirme un analyste politique. Pour confirmer cette analyse, la dernière déclaration de l’UNC n’a pas fait dans la dentelle. Les partisans de Vital Kamerhe rappellent ouvertement que l’ancien bras droit de Joseph Kabila et Félix Tshisekedi ont signé un accord à Naïrobi dans lequel le Chef de l’Etat s’est engagé à soutenir la candidature de son partenaire pour les élections de 2023. « Nous voulons un juste retour de l’ascenseur » déclare avec véhémence un des bras droits de Vital Kamerhe qui insiste sur le fait que « cette fois, nous ne jouerons plus la deuxième place. Nous avons été roulés par Joseph Kabila, nous ne le serons pas par Félix Tshisekedi ».


La primature ou rien


En contrepartie de son soutien, Vital Kamerhe entend se faire payer immédiatement. Son soutien au Chef de l’Etat est conditionné par le poste de Premier Ministre. « Pour nous, c’est un chantage de bas étage. Ce n’est pas négociable », affirme-t-on dans le camp Tshisekedi qui semble avoir compris que Vital Kamerhe ne battra pas campagne pour le Chef de l’Etat.

Pour les observateurs, il devient de plus en plus évident que Denis Kadima et la CENI constituent la dernière carte de Félix Tshisekedi. Un fichier électoral truqué donnant la part belle aux Kasaïens, le bidouillage informatique des données des 5 millions de déplacés internes et celui des 2 millions de Congolais de la diaspora, sont les grosses ficelles qui restent à utiliser pour rendre crédible une élection qui au fil des jours s’annonce de plus en plus difficile. De toutes parts dans le pays, la contestation grandit contre la mainmise d’une seule province sur l’appareil de l’Etat et le pouvoir organisateur des scrutins. La tribalisation du pouvoir ne passe pas ! Surtout au Katanga, où sous le couvert de l’Eglise catholique, la réconciliation entre Moïse Katumbi et Joseph Kabila a réveillé le nationalisme katangais.


Si les trois grands acteurs de la majorité sont dans un jeu de poker menteur, de nombreuses incertitudes planent sur l’avenir. A l’état de siège dans l’Ituri et le Nord Kivu s’ajoute la guerre contre le M23 qui stationne à la porte de Goma. L’aggravation de la situation sécuritaire complique très sérieusement la donne. La manière dont Félix se dépêtrera de ce dossier de plus en plus complexe se révèlera déterminante pour la suite de son mandat et sa possible reconduction à la tête de la RDCongo !

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