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Photo du rédacteurmutambak96

La dégringolade de Bemba : Tragédie en trois actes


L’homme qui a passé dix ans derrière les barreaux aux Pays-Bas a compris qu’il était en train d’être mis sur la touche par le pouvoir.


Premier Acte

Il y a trois mois, dans l'arène politique impitoyable électrisée par la campagne présidentielle, Jean-Pierre Bemba se lance dans une lutte acharnée contre Moïse Katumbi, dans une tentative désespérée de séduire Félix Tshisekedi au sein de l'Union Sacrée. Bemba sait qu'il doit s'imposer face à Vital Kamerhe, Modeste Bahati et Dany Banza. Tous sont issus de l'Est du pays, originaires de l'espace swahilophone et les trois cherchent à diriger une institution à l'issue des élections. Pas de demi-mesure pour cet ancien chef de guerre. Sur les ondes de Top Congo, Bemba abat toutes ses cartes. Il livre un réquisitoire sans pitié contre l'ancien gouverneur du Katanga, l'accusant de "piétiner des cadavres" pour ses ambitions égoïstes. Et ce n'est que le début.

Le vice-Premier ministre de la Défense lance des menaces à Katumbi, le qualifiant carrément d'agent du Rwanda, pointant du doigt ses liens avec le M23. Sans détour, JP Bemba attaque, dans une langue qu'on ne lui connaissait pas, en révélant des pseudos informations qu'il prétend détenir des services de renseignements de son ministère: "Pourquoi le monsieur (Moïse Katumbi) dont plus proche collaborateur, conseiller spécial, qui est aux arrêts découvert lors de son arrestation, tous les contacts qu’il avait quotidiennement avec le M 23. Est-ce que ce Monsieur-là que nous parlons, peux-tu dire qu’il était pas au courant de ça ?" Les accusations de Bemba contre Katumbi et son conseiller Salomon Kalonda sont gravissimes. Mais Bemba ne s'arrête pas là : il accuse carrément Katumbi de financer une opération russe pour pirater les serveurs de la CENI. Les sombres avertissements pleuvent, la tension monte. Rien n'est trop faux pour tenter d'ébranler le principal opposant et, surtout, pour tenter de séduire Félix Tshisekedi dans la dernière droite d'une élection présidentielle depuis longtemps boutiquée.


Deuxième Acte : la montée en puissance du M23

Mais voilà, la flamboyance de la campagne électorale s'effrite face aux réalités politiques. Avec seulement une poignée de soutiens parlementaires, Bemba se retrouve coincé. Sur la dictée de Félix Tshisekedi, la CENI accorde au MLC une vingtaine d'élus. Dans le camp de l'ancien chef de guerre, la désillusion est totale. Les ambitions de Bemba et son désir de pouvoir se heurte à un mur, celui des Kasaïens. "Il n'est pas question de se laisser fagoter par Bemba qui cherche à nous prendre le pouvoir", affirme-t-on dans les couloirs de la Présidence. Les promesses faites à Tshisekedi et les postures d'allégeance de Bemba ne suffisent pas à rassurer la famille présidentielle.

Dans les coulisses du pouvoir, les langues se délient : Bemba est vu comme un prédateur avide, cherchant à s'enrichir pour arracher le pouvoir. Les critiques fusent, les accusations pleuvent. Les militaires au front sont négligés, les fonds détournés. "Avec quatre fois moins d'argent, on aurait eu quatre fois plus de résultats au front", déplore un conseiller de Nicolas Kazadi qui traduit l'état d'esprit du grand argentier qui compte les millions de dollars décaissés à la demande de Bemba.

Entretemps, le M23 progresse sur le terrain. Les certitudes de Bemba sont remises en question. L'opposition se gausse du Vice-Premier Ministre de la Défense. "La seule conquête sur terrain est d'avoir récupérer par la force une servitude pour accéder à son domaine le long du fleuve Congo à Kinshasa", affirme avec ironie Olivier Kamitatu, le porte-parole de Katumbi.

Dans l'Est du pays, l'Alliance Fleuve Congo, AFC, la branche politique du M23, dirigée par Corneille Nangaa s'étoffe avec le recrutement de l'ancien porte-parole de Bemba, le député Jean-Jacques Mamba. De quoi attiser la méfiance au sein de la Présidence et de l'UDPS où Bemba est toujours considéré comme un faux repenti prêt à reprendre la guerre.

Pendant ce temps, au sein de l'opposition, les proches de Kabila hochent la tête, peu surpris par le comportement de Bemba. Ils rappellent les millions empochés autrefois par l'ancien chef rebelle lorsqu'à l'époque, en tant que Vice-Président de la République, il payait rubis sur ongle les factures de sa propre compagnie aérienne pour le transport des troupes à l'Est. "Décidément, même après 10 ans de prison, on ne se refait pas et l'on garde les mêmes habitudes", dit, goguenard, un conseille de l'ancien Chef de l'Etat.


Troisième Acte : le nouveau leadership de l'Equateur

Après une décennie en prison, Bemba semble inchangé. Il défie Kabila et Katumbi avec une ténacité sans faille. Mais il semble oublier que Tshisekedi aussi sait jouer le jeu politique, prêt à sacrifier Bemba s'il le faut.

Dans l'Equateur, une nouvelle génération politique émerge, prête à prendre la relève. Elle s'appelle Jean-Pierre Lihau, 49 ans, pressenti Premier Ministre, ou encore Guy Loando Mboyo, 41 ans, le nouveau leader de l'Equateur. Tous incarnent la relève et constituent une promesse pour l'avenir d'une province que Bemba a délaissée au profit de ses intérêts personnels. La maison Bemba vacille, menacée par une majorité présidentielle qui tourne la page des guerriers du passé.

La chute de la maison Bemba semble inévitable, son destin scellé par son arrogance et ses manœuvres désespérées. Reste que la levée du moratoire sur la peine de mort inspirée à Félix Tshisekedi par Jean-Pierre Bemba reste la carte ultime dans la quête de vengeance de l'ancien chef de guerre contre ses ennemis personnels au premier rang desquels se trouvent Kabila, Katumbi, Kamitatu et Kalonda, les quatre K. La guerre est loin d'être finie !



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