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Photo du rédacteurmutambak96

Bemba et Kamerhe préparent leur départ… Enquête dans le monde des lobbyistes américains


Dans quelques jours, les chefs d'État du monde entier se réuniront à New York pour l'Assemblée Générale des Nations Unies. Cette rencontre annuelle est précédée de plusieurs forums impliquant des parlementaires et des leaders du développement, où des contacts bilatéraux sont établis.


Ces échanges peuvent ouvrir la voie à des solutions pour divers conflits. Il est donc probable que le président João Lourenço utilisera cette occasion pour poursuivre ses efforts en faveur du processus de Luanda et faciliter un accord concernant le conflit entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda.


À Washington, le processus de Luanda est suivi de près par l’administration sortante. Les autorités américaines soutiennent activement João Lourenço. Aux côtés du président kényan Ruto, le président angolais est devenu un partenaire écouté par les États-Unis, comme en témoigne la décision de Joe Biden de se rendre à Luanda. Ce choix met en lumière l'importance de l'Angola et son rôle de leader régional. Des enjeux géostratégiques significatifs sont sur la table, notamment le chemin de fer de Benguela, essentiel pour l'évacuation de minerais stratégiques du Katanga vers le port de Benguela sur la façade atlantique.


Cette visite présidentielle américaine est le résultat d'une diplomatie angolaise agissante relayée par un lobbying efficace au sein de l'administration américaine du Département d'Etat, du Pentagone et de la Maison Blanche. Les lobbyistes recrutés à prix d'or par l'Angola sont parties prenantes à ce succès.


Précisément, dans la constellation des lobbyistes qui opèrent à Washington, plusieurs d'entre eux assurent la promotion de plusieurs chefs d'Etat et personnalités politiques africaines. Une étude publiée par l'institut Center for International Policy atteste qu'entre 2016 et 2020, près de 161 millions USD ont été dépensés par des clients africains dans des firmes de lobbying ayant pignon sur rue à Washington. Ces entreprises sont enregistrées et obéissent au Foreign Agents Registration Act, FARA, qui réglemente la profession. Elles sont tenues de déclarer leurs activités au ministère américain de la Justice.



Les principaux gouvernements ayant recours à ces lobbyistes sont le Libéria, le Maroc, la République Sud Africaine, l'Egypte et la RDCongo.


La firme la plus florissante, réputée proche du président Donald Trump, est dirigée par Brian Ballard, assisté de son partenaire Sylvester Lukis qui sous-traite une grande partie des opérations pour le compte du gouvernement congolais. Pour la petite histoire, c'est en 2017, par l'entremise de Moise Katumbi que Ballard a mis le pied à l'étrier sur le dossier congolais en signant un contrat de 600.000 Usd/an avec l'ancien gouverneur du Katanga. Parallèlement, ce dernier avait également recruté deux autres cabinets Akin Gump, Strauss et Brownstein, Hyatt et Schreck. En 2022, Félix Tshisekedi embauchait à son tour Brian Ballard pour un contrat de 900.000 Usd. Il ajoutait à son arsenal le cabinet Scribe Stratégies and Advisors.


Plus de 7,5 millions de dollars dépensés par an

En moyenne, Kinshasa dépense aujourd'hui plus de 600 000 $ par mois pour le lobbying, avec des contrats significatifs tels que celui de Gécamines avec Mercury Public Affairs (John Lonergam), qui s'élève à 3 millions de dollars, et celui de Nicolas Kazadi qui recourt aux services de FGS Global (Michael Soho), pour 3,5 millions de dollars. A ces deux contrats d'un montant de 6,5 millions de dollars s’ajoutent un contrat de 1,5 million de dollars signé par Patrick Muyaya avec Aaron Pynton.


Au total, le trésor public congolais et la Gécamines décaissent 7,5 millions de dollars par an pour l'image de la RDCongo à Washington. Cette somme dépasse largement les dépenses angolaises qui se chiffrent à environ 3,2 millions de dollars. Si les lobbyistes pro-Angola ont pu obtenir la visite du président Biden, ceux de Félix Tshisekedi ont pu obtenir la reconnaissance du régime congolais issu d'élections contestables et décrocher la tenue du sommet de l'AGOA à Kinshasa. Un succès non négligeable quand on connaît la situation chaotique de la RDCongo.


Les comptes bien garnis de Denis Kadima 

Pour la petite histoire, il est également rapporté que la CENI a signé un contrat avec Manchester Trade dont le montant officiellement annoncé est de 200 000 $, alors que des sources suggèrent qu'il pourrait être en réalité beaucoup plus élevé, s'approchant des 500 000 $. Denis Kadima est désormais l'une des personnes les plus riches de la RDC. Il a fait l'acquisition de deux manoirs aux États-Unis pour environ 6 millions de dollars et possède également d’autres biens en Afrique du Sud.



Au moment où le gouvernement de Félix Tshisekedi dépense sans compter pour assurer la promotion de son image par les lobbyiste, l’ambassade de la RDC à Washington fait face à des difficultés extrêmes, n’ayant pas de ressources pour payer ses factures. Le personnel de l'ambassade est abandonné. Les rémunérations tardent à être payées. Le bâtiment est dans une situation catastrophique. L'ambassade est fermée en raison de son état de délabrement, avec des problèmes tels que des rongeurs. Les voisins ont même porté plainte contre la RDC à ce sujet, ce qui témoigne d'une situation de honte et d'embarras. Il est frappant de constater que l’ambassade du Rwanda à Washington D.C., située non loin de celle de la RDC, est, elle, probablement l’une des ambassades les mieux gérées et les mieux dotées en ressources. L’ironie de la situation est palpable. L’efficacité et l’efficience de leur ambassadrice contrastent profondément avec le désastre organisationnel qui frappe la chancellerie congolaise.


Bemba – Kamerhe : le bal des hypocrites

Ce qui étonne les observateurs américains c'est d'assister aux manoeuvres de certains leaders politiques congolais, tels que Jean-Pierre Bemba, Vital Kamerhe et Julien Paluku, qui cherchent eux aussi discrètement à engager des lobbyistes pour façonner leur image. Au sein du régime Tshisekedi et de la majorité de l’Union Sacrée, le bal des hypocrites a véritablement commencé. Les sollicitations et les courbettes de ces leaders envers Félix Tshisekedi dissimulent en réalité leurs ambitions de lui succéder. Conscients des montants financiers importants nécessaires à leur campagne, les principaux leaders de la majorité font le grand écart entre la fidélité affichée au Chef de l'Etat et leur volonté de s'affranchir de sa tutelle en vue des élections présidentielles de 2028. Reste à savoir quand et comment ils assumeront leur divorce programmé avec Félix Tshisekedi.


Le cas de Jean-Pierre Bemba, l'actuel Vice-Premier Ministre des Transports est le plus révélateur. Après s'être refait une santé financière, l'ancien chef de guerre qui est toujours interdit de séjour aux Etats-Unis du fait de sa condamnation par la Cour Pénale Internationale a choisi son partenaire pour peaufiner son image à Washington. Il s'agit d'un associé au sein de la société de relations publiques BLF Worldwide, où il a dirigé la campagne pour la candidature de la Chine à l’organisation des Jeux olympiques de 2008. Selon des documents déposés auprès de la FARA, celui qui se présente comme lobbyiste de JP Bemba est actuellement impliqué avec la China-U.S. Exchange Foundation, fournissant des services visant à promouvoir les intérêts chinois aux États-Unis. Ses tâches comprennent l'augmentation du soutien tiers, la génération de placements médiatiques, l'organisation de visites de délégations en Chine et le soutien aux activités de la CUSEF aux États-Unis.


En s'invitant comme le principal intermédiaire entre la Chine et la République Démocratique du Congo en qualité de patron du desk chargé de définir les grands projets de reconstruction que la partie chinoise doit réaliser, Bemba cherche à se positionner sur les deux superpuissances. Pour séduire Pékin sans déplaire à Washington, rien de mieux que de recruter un "ambassadeur" spécialiste des relations sino-américaines. A Kinshasa, plusieurs membres de la famille présidentielle s'inquiètent de la naïveté de Félix Tshisekedi, qui « laisse faire » et continue de compter sur Bemba pour mener sa politique. Cette alliance pourrait en effet soulever des questions sur le discernement du président.


Ces leaders misent en réalité sur l'affaiblissement de Félix Tshisekedi tout en se positionnant comme de potentiels successeurs. Leur soumission à Félix Tshisekedi est une façade hypocrite. Elle cache en réalité leur opposition sournoise au changement de la Constitution, que le Président et ses alliés souhaitent, dans le but de prolonger leur propre règne. Les manœuvres des leaders de l'Union sacrée s'inscrivent dans un pur calcul politique, alimenté par des intérêts personnels.


Pour Félix Tshisekedi, le temps des ruptures approche. Après avoir profité des fonds publics, ses principaux alliés préparent leur départ, prêts à quitter le navire pour poursuivre leurs ambitions.

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